mercredi 5 octobre 2011

Chut (8)




À travers la fenêtre, la tante entend le chahut de la rue. Elle fait glisser le rideau pour voir, à travers le carreau, le mouvement du bruit des voitures-et-passants. Devant la terrasse du café d'en bas, les vivants fourmillent dans le chaud du soleil, sur fond de moteurs en route vers plus loin et d'avertisseurs sonores qui ponctuent pour un rien. Elle court éteindre le poste de radio comme pour faire stopper le vacarme du dehors les murs. Cigarette et vodka d'un trait. Silence. Ça fronce, mais encore.  Bouteille vide. Presse-bouton du bout du cordon de sonnette moderne. On frappe. Porte ouverte. Il entre queue de pie, lunettes, sourire et dents. "Parlez-vous… fran-çais ?" avec accent de la Suède, cibiche aux lèvres, bouteille au poing et pyjamas sur belle moquette. "Do you speak English ?" - "Sprechen Sie Deutsch ?" Muet, il s'empare du verre sifflé, mime une promesse de retour. Elle sifflote d'un acquiescement qui la dandine, de dos, dans le miroir, les pieds nus. Puis fauteuil,  cigarette. Chantonne. On frappe. Sourire. Eau de prune sur un plateau. Le monsieur ne fume pas. Mais "main" ? Comment tu dis "main", Monsieur ? "Käsi", c'est écrit. On sonne pour lui. Il rit mais court, car il y a métier. Elle reste avec bout de papier et la vie des prunes. Elle s'assoie sur le lit. Un temps. S'allonge et caresse la sienne, de vie. Comme entretien d'une espérance. D'une sieste, l'autre.

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